De Bien Troublants Ennemis
Toujours empreint de mystère, d’action et de rebondissements, le tome 3 vous fera frissonner dans une ambiance sombre et étrange, en plein cœur d’une région méconnue et dangereuse.
Résumé
Confiants et courageux, les sept élus franchissent la chaîne des Montagnes Interdites, prêts à sauver le monde, mais ils sont loin d’imaginer les secrets que cachent les profondeurs de ces terres hostiles bien moins désertes qu’il n’y paraît.
Immergés dans une ambiance feutrée et inquiétante, les compagnons devront vaincre
des êtres étranges et échapper à bien des pièges avant de parvenir enfin aux portes de l’antre des destructeurs.
Dans leur château lugubre, leurs ennemis se préparent à recevoir ces élus hors du commun qui ont la prétention de pouvoir les anéantir. Rusées et machiavéliques, les Sœurs Sombres ruminent de bien sinistres projets à leur encontre…
Extrait
Prendre connaissance de l’extrait suivant sans avoir déjà lu le tome 1 n’est pas recommandé car des informations vont vous y être révélées.
Le texte qui suit est la propriété de son auteur et ayants droit. © 2020 Ophélie Faline.
Groby ausculte minutieusement une boule de morve verdâtre posée à l’extrémité de son index afin d’être sûr qu’elle a la forme qui lui convient. N’étant pas satisfait, il la roule de nouveau sur elle-même jusqu’à ce qu’il la déclare parfaite, et d’une pichenette, l’envoie voler au hasard. Suivant sa trajectoire des yeux, il la voit percuter l’écorce d’un tronc d’arbre qui n’était pas là tout à l’heure.
La bouche ouverte et les yeux agrandis d’étonnement, Groby regarde l’immense forêt qui l’entoure en se demandant où sont passés ses amis, les montures et les bâtiments déserts de la forteresse. Persuadé de s’être éloigné sans le vouloir tant il était appliqué au curage de son nez, il s’apprête à rebrousser chemin, quand réalisant ne plus se rappeler du trajet, il se fige, blafard.
Groby sourit quand son ventre rebondi se met à gargouiller en lui rappelant le jour, où dans le sud, il avait réussi à sortir de la jungle grâce à ses gaz à l’arôme tenace. Persuadé de retrouver rapidement l’orée en usant de la même tactique, il se met en route tout en ponctuant son chemin d’une kyrielle de pets qui s’envolent, répandant leur intense bouquet dans son sillage.
Il n’a pas parcouru une demi-lieue que le barde sent déjà la faim lui tirailler l’estomac. Le ravitaillement se trouvant sur le dos de leurs montures, il ne lui reste plus qu’à fouiller dans sa besace à la recherche de quelques bienheureuses miettes qui s’y seraient peut-être perdues, mais n’y trouvant rien, il la referme en faisant triste mine. N’étant pas capable de réfréner son envie jusqu’à ce qu’il ait rejoint la caravane, l’ogre affamé entreprend l’exploration des alentours au cas où il y découvrirait un petit quelque chose à se mettre sous la dent. Plié en deux, il soulève les feuilles mortes étalées sur le sol sans rien dénicher d’autre que de la terre ou de l’herbe humide.
Dépité de ne parvenir à mettre la main ne serait-ce que sur un petit champignon comestible, il erre là où le vent le pousse en boudant et traînant les pieds, jusqu’à ce qu’il se fige net à la merveilleuse vision… d’une fraise. Et pas n’importe quelle fraise, car c’est bien la plus belle qu’il ait jamais vue de toute sa vie. Perdu tout seul au milieu du trône d’une touffe d’herbe, ce fruit charnu à croquer brille d’un rouge éclatant. Avec sa robe parsemée d’akènes jaunes et son joli calice vert, elle semble être la reine de ces lieux et n’attendre qu’une chose : qu’on vienne la cueillir. Se pourléchant les babines à l’idée de mordre dedans, Groby se précipite sur cette merveille de la nature, ses deux mains en avant.
N’ayant d’yeux que pour ce fruit béni qui ne peut être qu’excellent, le barde ne remarque pas tout de suite un petit hamster qui trottine un instant à sa hauteur. Accélérant soudain son allure, l’animal le dépasse et arrive à la baie avant lui. Sous le regard paniqué de Groby, le rongeur s’en saisit sans vergogne et la fourre illico dans sa bouche, faisant gonfler démesurément ses bajoues.
Voulant accélérer l’allure afin d’attraper le petit gourmand avant qu’il ne le perde de vue, l’ogre se prend les pieds dans une racine et s’étale sur le ventre. Leurs regards se croisent un instant, puis le hamster se sauve en trottinant. Ne voulant pas en rester là, Groby se lève d’un bond et se lance à la poursuite du chapardeur, bien décidé à lui reprendre son encas cavalièrement volé sous son nez, car après tout, il est persuadé de l’avoir vu en premier.
Tout en courant aussi vite que son gros gabarit le lui permet, Groby saute par-dessus les haies et slalome entre les arbres sans quitter l’animal des yeux, jusqu’à ce que subitement freiné par une chose importune qui l’a agrippé sur son passage, il se voit contraint de s’arrêter. Tournant la tête, il découvre, horrifié, une gigantesque toile d’araignée aux filaments si transparents qu’il ne l’avait pas remarquée en passant à côté. L’un de ces fils qui chatoient joliment sous les rais de lumière filtrant à travers la canopée s’est accroché à sa manche.
Le barde frissonne. Si cet enchevêtrement de fibres gluantes est à la taille de la bête qui l’a tissé, elle doit forcément être encore plus imposante que celles qu’il a affrontées avec l’aide de ses amis dans la Forêt des Sortilèges. N’ayant nulle envie de vérifier cette évidence, il attrape le fil à deux mains et tire dessus, persuadé qu’il ne résistera pas bien longtemps. N’obtenant aucun résultat, il force de plus belle, motivé par la peur de voir surgir le monstre à tout instant. Ne parvenant toujours à rien, il tente de reculer en espérant que la fibre craquera sous l’effet de la tension. Malgré cette maltraitance, cette substance, bien plus solide qu’elle n’y paraît, résiste toujours.
Groby se démène tant et si bien qu’il dérape sur un tapis de feuilles mortes et glisse en direction de la toile. Le visage blafard, il tente de se retenir aux arbres qui l’entourent sans y parvenir et plonge la tête la première dans le piège. Prit de panique, le barde s’agite en s’emmêlant dans la soie jusqu’à ne plus pouvoir bouger.
Le visage empreint d’une terrible colère, l’ogre, enfermé dans son cocon, ne peut manquer de voir le hamster, bien installé sur la branche d’en face, qui le regarde en extrayant de sa bouche la grosse fraise juteuse. Après avoir pris le temps d’observer son butin, l’animal se met à le grignoter goulûment, les yeux pétillants de malice. Quand il n’en reste plus rien, le rongeur entreprend de se nettoyer la bouche et les pattes, rougies et collantes par le jus sucré du fruit, quand des bruissements de feuilles lui font dresser l’oreille. Présageant la venue d’un éventuel prédateur, il s’éclipse aussitôt, laissant Groby seul face à son bien sinistre destin.
D’inquiétants vrombissements se rapprochent du prisonnier, soudain pris d’une terreur sans nom. Tout à coup, surgi d’entre les branches, un monstre gigantesque et au corps lisse s’approche subrepticement de sa proie en faisant vibrer la toile sous ses pattes démesurément longues. Trempé de sueur et les paupières écarquillées, le pauvre barde, voyant sa fin s’approcher à grands pas, se tortille désespérément dans tous les sens, s’empêtrant davantage.
Une épouvante inimaginable s’empare de sa personne quand il découvre qu’une deuxième araignée s’approche en arrivant de l’autre côté. Et lorsqu’une troisième, à la tête aussi ronde que sa boule de morve, fait son apparition juste en face de lui, le souffle vient à lui manquer. Ces bêtes immondes et menaçantes claquent des mandibules, prêtes à faire leur repas de leur proie, faisant si peur au pauvre barde qu’il croit mourir sur place tant son cœur s’emballe.
Gripine lui a raconté un jour que son père disait toujours qu’il n’y a pas de problème qui n’ait sa solution, mais faudrait-il encore qu’il soit assez intelligent pour la trouver rapidement. Après tout, si les divinités ont décidé qu’il serait un des élus, c’est qu’il est capable de vaincre le plus farouche des ennemis et de se sortir de situations desquelles le commun des mortels en serait incapable. N’étant plus l’ogrillon maladroit et pataud qui n’était bon qu’à allumer un feu de camp, mais un barde guerrier qui combat le mal, il doit être à même de venir, à lui seul, à bout de ces trois araignées hideuses.
Retrouvant son assurance, le nœud qui obstruait le fond de la gorge de Groby se dénoue enfin tandis qu’une étincelle d’espoir renaît en lui comme le phénix de ses cendres. Sa voix enfin revenue, il hurle une note vibrante en tirant si fort sur ses membres emprisonnés que la toile se déchire dans un gigantesque craquement.
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